OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Comcast, Level 3 et la cuisson des pommes de terre http://owni.fr/2011/01/01/comcast-level-3-et-la-cuisson-des-pommes-de-terre/ http://owni.fr/2011/01/01/comcast-level-3-et-la-cuisson-des-pommes-de-terre/#comments Sat, 01 Jan 2011 11:00:20 +0000 Stéphane Bortzmeyer http://owni.fr/?p=40745 Alors que la FCC vient de se décider à trancher -mollement- dans le débat sur la neutralité des réseaux, Stéphane Bortzmeyer revient sur une obscure affaire opposant deux opérateurs américains, Comcast et Level 3. Le premier, aux fonctions classiques de fournisseur d’accès à Internet, s’est notamment fait remarquer sur nos terres en bloquant certains échanges peer-to-peer, ce qui lui a valu les remontrances de la FCC, dont la légitimité s’est vue par la suite niée par la Cour Suprême. Plus anonyme, le second endosse les fonctions d’hébergeur CDN, en favorisant la diffusion du contenu de certains sites. Et en particulier Netflix, dont la propension à siphonner de la bande passante a poussé les sites spécialisés américains à s’interroger: le site de streaming video annonce-t-il la fin d’Internet ? Cette gourmandise est précisément au cœur du conflit opposant Comcast et Level 3, le second reprochant au premier de lui imposer une charge excessive pour que les films de Netflix transitent par son infrastructure.
Stéphane Bortzmeyer précise les termes de cette guerre de tuyaux, rappelant ainsi la complexité inhérente à la question de neutralité des réseaux, qui dépasse largement le binôme internautes/FAI.

Il y a déjà eu beaucoup d’articles, surtout aux États-Unis, à propos du conflit qui oppose deux opérateurs Internet, Comcast et Level 3 (j’ai mis quelques références à la fin). Je n’ai pas de sources privilégiées, je ne suis pas un « blogueur influent » donc je ne vais pas pouvoir vous faire de révélations sensationnelles mais il y a quand même, deux ou trois points que je voudrais traiter. Donc, Comcast réclame à Level 3 des sous et Level 3 porte l’affaire devant le régulateur. Pourquoi ?

Une bonne partie des articles sur le sujet ont cherché, dans un style très hollywoodien, qui était le Bon et qui était le Méchant dans le conflit (en général, Comcast était le Méchant, rôle qu’ils tiennent à la perfection). Mais, évidemment, il n’y a pas de morale ici, juste du business entre deux requins: celui qui était le plus fort encore récemment et celui qui a grossi et exerce ses muscles.

Patate chaude et paquets d’IP

Pour se faire une idée du problème, faisons un petit détour par la technique. D’abord, comme Comcast a accusé Level 3 de « router selon la méthode de la patate chaude », revenons sur cette technique.

Soit deux opérateurs situés aux États-Unis. C’est un grand pays. Si un paquet IP part de la côte Ouest pour aller sur la côte Est, il a beaucoup de chemin à faire. Si le paquet part d’un opérateur pour aller vers un autre, qui va utiliser ses précieuses ressources pour lui faire traverser le continent ? Contrairement à ce que Comcast laisse entendre, la méthode la plus répandue a toujours été la patate chaude : l’émetteur essaie de faire sortir le paquet de son réseau le plus vite possible, avant qu’il ne lui brûle les mains. C’est donc le destinataire qui va se taper l’acheminenent. C’est injuste ? Pas si on tient compte du fait qu’une communication met en jeu des paquets dans les deux directions. Au retour, ce sera l’inverse. Si le trafic est à peu près symétrique (en nombre de paquets et en nombre d’octets) qu’on route avec la patate chaude ou avec la patate froide n’a aucune importance, du moment que les deux opérateurs font pareil.

Cette symétrie était celle pour laquelle était prévu l’Internet : chacun pouvant être à la fois consommateur et producteur, l’idée était que le trafic serait à peu près égalitaire, faisant du choix de la température des pommes de terre un choix purement arbitraire et sans conséquences pratiques.

Seulement voilà, dans la réalité, les grosses entreprises n’ont pas fait ce choix. Comcast contrôle un marché de consommateurs purs (eyeballs en anglais, ou « temps de cerveau disponible » en français) et Level 3 fait surtout de l’hébergement. Le trafic est donc très asymétrique. Comme on le voit sur le dessin plus haut, si Level 3 héberge un gros fournisseur de vidéo (Netflix, dont l’arrivée chez Level 3 a déclenché la crise), et qu’on utilise la patate chaude, la grande majorité des octets va passer sur le réseau de Comcast, posant donc la question de base « qui va payer ? ».

Un trafic asymétrique, des usages déséquilibrés

Il y a des solutions à ce problème.

Avant des les regarder, une note importante : comme tout ceci n’est qu’une histoire de gros sous, rien n’est documenté publiquement. Le citoyen de base, et même le sénateur qui se demande s’il doit voter la neutralité du réseau ou pas, n’ont pas toute l’information qui permettrait de décider. La mode étant aux fuites, on a même vu des graphes de trafic prouvant que Comcast étranglait délibérement le trafic entrant (pour réclamer ensuite des paiements aux fournisseurs de contenu), envoyés anonymement… (Évidemment aucune garantie quant à leur véracité.) Si Comcast et Level 3 se préoccupaient réellement de la vérité, ils commenceraient par publier des informations précises. (Dans ce genre d’affaires, chacun des requins prend à témoin l’opinion publique, sans jamais lui donner les moyens de s’informer et donc de décider.)

Revenons à la technique. Il faut noter que Comcast n’est pas un pair de Level 3 mais un client de son offre de transit. Ce conflit n’est donc pas l’équivalent des classiques crises entre pairs, dont le FAI Cogent s’est fait une spécialité. Dans la plupart des contrats de transit, le client a des tas de moyens pour influencer le routage chez son fournisseur (comme les MED). Pourquoi Comcast ne les utilise-t-il pas ?

Comcast cherche-t-il vraiment une solution?

Le plus probable est que Comcast ne veut pas d’une solution, il veut faire plier Level 3, en profitant de ce que Comcast a une clientèle captive (dans la plupart des villes petites et moyennes, Comcast a un monopole).

Deuxième raison, pas incompatible avec la première, Netflix est un concurrent de l’offre TV de Comcast -historiquement, une entreprise de télé par câble. Il y a donc un cas classique de violation de la neutralité du réseau par Comcast, discriminer entre son service et celui des concurrents, quand on cumule plusieurs casquettes (FAI et fournisseur de services).

La meilleure solution serait d’arrêter l’énorme dissymétrie qui existe aujourd’hui entre les opérateurs, selon qu’ils font du contenu ou du temps de cerveau. Il est curieux que Comcast reproche à Level 3 de lui envoyer bien plus d’octets que son client ne lui en transmet, alors que Comcast fait exactement cela à ses propres clients, en leur vendant une offre Internet asymétrique, à bien plus grande capacité dans le sens de la consommation que dans celui de la production. Mais ce n’est pas plus incroyable que Level 3 qui demande l’intervention de la FCC alors que, quand le rapport de force lui était plus favorable, ses dirigeants bêlaient systématiquement le discours individualiste du « moins d’État, moins de régulation ».

Cette dissymétrie du trafic et des usages fausse tous les débats sur la neutralité du réseau, en créant une source de mécontentement. C’est ce que réclame régulièrement FDN, par exemple. Le développement d’usages plus équilibrés, par exemple avec le pair-à-pair annulerait une bonne partie des discussions récurrentes.

Quelques articles sur le sujet, avec mes commentaires :

  • Le point de vue officiel de Comcast et celui de Level 3,
  • Une petite partie de la très longue discussion sur la liste NANOG à ce sujet,
  • Un amusant dessin animé où le client de Comcast est représenté sous forme d’un ours en peluche buté qui ne sait que répéter « No, this is not fair » alors qu’il demande la même chose que ce que Comcast demande à Level 3,
  • Un bon article de TelecomTV qui met les choses en perspective, et qui explique bien l’affaire des pommes de terre chaudes ou froides,
  • Un article en français (contrairement à la plupart des autres cités ici), qui prône plutôt une augmentation des coûts d’abonnement, qui financerait les FAI tout en préservant la neutralité du réseau,
  • Une excellente analyse de Adam Rothschild, avec de très utiles dessins, et surtout une discussion du problème des liens externes de Comcast, notamment celui avec Tata, qui sont utilisés au maximum de leurs capacités (le problème des graphes fuités mentionnés plus haut),
  • La plupart des articles (y compris le mien) pointait plutôt du doigt la mauvaise foi de Comcast. Il y a aussi un tout petit nombre d’articles de l’autre bord. Celui de Daniel Golding que je cite est assez radical, comme lorsqu’il prône une nette séparation entre fournisseur de transit et hébergeur (Level 3 étant à la fois Tier-1 et hébergeur de Netflix). Mais cet article contient également des énormités comme lorsqu’il reprend la légende (popularisée en France par Free ou France Télécom) comme quoi l’opérateur du fournisseur de contenu serait payé deux fois, par son client d’hébergement (Netflix) et par son client de transit (Comcast). Pour voir pourquoi cette idée est absurde, il suffit d’imaginer deux clients de Free qui s’envoient des octets. Chacun a dû payer sa connexion. Dit-on pour autant que Free a été payé deux fois et devrait rembourser un des clients ? Incroyable, mais c’est pourtant le discours d’articles comme celui-ci.

Article initialement publié sur Bortzmeyer.org
Illustrations CC Flickr: eirikso, Tom Purves

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Il n’y a pas un mais DES Internets … http://owni.fr/2010/04/14/il-n%e2%80%99y-a-pas-un-mais-des-internets-%e2%80%a6/ http://owni.fr/2010/04/14/il-n%e2%80%99y-a-pas-un-mais-des-internets-%e2%80%a6/#comments Wed, 14 Apr 2010 08:20:35 +0000 Jean Michel Planche http://owni.fr/?p=12277 Le concept de neutralité du Net fait débat en ce moment. Explications pédagogiques de cet enjeu fondamental, qui vise à ce “que personne ne puisse s’accaparer notre capacité d’échange, de communication et de création, en un mot d’exister sur ces futurs territoires numériques”.


… MAIS … ce n’est pas une raison pour laquelle il faut faire n’importe quoi et ne pas alerter lorsqu’il y va d’un sujet aussi stratégique que le réseau de communication qui sous-tend la plupart de nos usages numériques d’aujourd’hui et de demain, mais aussi, des choses plus importantes encore que tous ceux qui discutent autour de la neutralité «du net» semblent ne pas voir ou feindre d’ignorer : notre vie numérique tout entière, pas seulement le droit de consommer, mais celui :

> d’exister, sans avoir à en demander l’autorisation par quelques grands orchestrateurs et dont l’épicentre ne sera pas toujours celui de notre citoyenneté
> de contrôler l’usage et les contenus dont on veut nous gaver jusqu’à en étouffer.
> de maîtriser, jusqu’à la création, sans devoir, là aussi demander la permission à quelques grands orchestrateurs, pour accéder à nos propres données et implorer qu’il n’en soit pas fait n’importe quoi.

Vous me savez attaché à ce concept de neutralité, dont je vous ai souvent (trop ?) parlé. Pour mémoire, il y a même un site sur le sujet, où tout ( ? ) est dit.
Mais quand j’ai vu la frénésie de tables rondes, de commissions, de discussions, d’interview sur le sujet, fidèle à ma ligne directrice, j’ai fais l’inverse : je suis rentré dans ma coquille, en réaction, en résistance même …

Pourquoi ?

Et bien tout simplement parce que s’il y a débat, c’est que certains le veulent et que je ne suis pas certain qu’il en ressorte du mieux. Je suis même assez certain du contraire, sinon, pourquoi en parler, pour défendre un concept qui ne fonctionne «pas si mal» ?

Pourquoi maintenant, alors que cela fait 20 ans que l’on travaille aux meilleures interconnexions possibles et que l’on explique la nature particulière de l’Internet ?
A partir du moment où on associe tous les miasmes et où l’on ouvre la boite de pandore, il était normal qu’ils sortent et que l’on passe du traditionnel «c’est la faute au net» à «j’ai ma solution, qui consiste à interdire ce qui ne sera pas explicitement autorisé et qui me gêne.»

Bref, je ne voulais pas participer à ce simulacre de défense du bien public, qui ne manqueraient pas de nous enfermer, tôt ou tard, dans des compromis mal négociés et où l’Internet ouvert, neutre que nous appelons de nos voeux ne serait qu’une vague vision naïve (comme ils disent) de quelques illuminés, souvent barbus.

Par ailleurs, sur ce sujet et bien d’autres, je pensais que je m’étais déjà largement exprimé et qu’en plus TOUT A ETE DIT. Il suffit de se baisser pour lire ou entendre des choses intelligentes, sans forcement que j’ai quelques chose de plus à rajouter:

> iciici,
> ici,
> ici ou la
> ou pire : iciiciici et là ici.

Mais, la chaire est faible …

… et coup sur coup, j’ai dis oui à deux initiatives :

> la première : demain, un jour prochain (l’enregistrement de mardi vient d’être reporté) où j’accompagnerais l’excellent Fabrice Epelboin sur le plateau de Techtoc.tv, avec le Ministre de la Défense : Hervé Morin.
> la deuxième, où je suis invité par «la direction générale de la compétitivité de l’industrie et des services», service STIC / SDRU à une audition, vendredi prochain (16/4/2010). Initiative qui semble liée à la consultation publique, lancée par le « secrétariat d’état chargé de la prospective et du développement de l’économie numérique ».

En fait, plus que tout, je suis assez sidéré de voir le brouet que chacun fait de cette histoire de neutralité, à l’aune de ses propres intérêts et de sa compréhension supposée ou réelle du problème. Je prends le risque ici, de me fâcher avec tout le monde en essayant de mettre les pieds dans le plat pour que l’on évite, une fois de plus de passer à coté d’une formidable opportunité.

Tout d’abord les faits, qu’ils plaisent ou non :

IL N’Y A PAS UN INTERNET, MAIS DES INTERNET

Disant cela, je ne dis pas qu’il faut cloisonner et que j’accepte que certains soient plus « égaux » que d’autre ou que tout le monde ne puisse pas communiquer avec tout le monde. Je ne fais que redire ce que je disais il y a 15 ans, lorsque je dirigeais Oléane. L’Internet d’Oléane (pour les entreprises) n’était pas le même que celui de Transpac, ni que celui des fournisseurs d’accès «grand public» (que nous alimentions pour l’essentiel, entre Transpac et nous), ni même que celui de Renater.

Chacun avait sa propre philosophie, ses propres moyens, sa propre « saveur » et … son propre tarif. Fabriquer un Internet «qui marche» pour une entreprise, dans des ratios symétriques, avec une contention limitée, une certaine sur-capacité et un personnel 24h/24 n’est pas de la même nature que vendre un service triple play à des particuliers pour 30 € / mois. Non, Opentransit et Free par exemple ne font pas le même métier MAIS … cela ne veut pas dire qu’il y en a un qui fait mal son travail.

Disant cela, je ne voudrais pas que certains croient que je vis dans l’illusion d’un passé révolu. J’ai suivi le sujet de près et demeure proche de nombreux opérateurs ET d’utilisateurs pour avoir la faiblesse de penser ce que je dis.

Je me dois d’ailleurs de rappeler qu’au début de l’Internet … il fallait montrer patte blanche pour s’interconnecter avec les autres … de la NSFNet jusqu’à Renater compris. Le monde de la recherche n’avait alors pas vraiment besoin du monde «commercial» et nous le faisait savoir de belle manière. A ma connaissance, Oléane a été le premier «privé, en France» à obtenir une interconnexion complète avec la NSFNet en 1992 ….

IL N’EN DEMEURE PAS MOINS QU’IL Y A CERTAINES RÈGLES À RESPECTER

Il y va du fameux « vivre ensemble », comme je l’entends beaucoup en ce moment. Je pense bien sûr à des règles écrites … les fameuses RFC qui permettent une réelle interopérabilité technique entre les différents fournisseurs. On a aussi les normes, les standards … et même certains puissants (Apple, Microsoft …) s’y plient : quand le marché l’exige, ne l’oublions jamais.

Mais ceci s’appelle des obligations de moyens.

Il y a aussi et c’est là que je vais aussi diverger avec beaucoup, des obligations de résultats. Lorsque l’on prétend vendre de l’Internet, il me semble nécessaire d’avoir :

> une certaine idée de la performance et de la qualité … vous savez que c’est mon cheval de bataille depuis 10 ans, je ne vais certainement pas l’oublier. Il est trop facile de dire Fibre, 100 Mbps et de ne délivrer qu’un goulet d’étranglement à un pseudo Internet. De l’Internet qui fonctionne bien, cela coûte cher, en investissement, en temps, en compétences et en efforts quotidiens.
> une idée certaine de l’interopérabilité. Sommes-nous certain d’être toujours joignables ? par tous les réseaux, à toute heure ? … la réponse est bien sûr non ou plutôt, nous pensons que parce qu’il s’agit d’Internet (pronom indéfini et neutre, pour le coup), on est «sur Internet», donc on fait partie du bidule. Et bien NON ! La qualité dépend d’énormément de facteurs et en particulier de comment vous êtes connectés, comment les gens qui souhaitent vous contacter sont connectés et … de ce qui se passe au milieu n’est pas neutre non plus !!
- Lorsque j’envoie un courrier électronique, j’ai envie qu’il arrive tout de suite, pour tous les utilisateurs et pas que l’on m’explique quelques heures après que mon adresse était filtrée pour mon bien !
- Lorsque j’héberge ma vie numérique chez moi, j’ai envie de pouvoir y accéder de partout et pas simplement … de chez moi.

IL NE FAUT PAS CONFONDRE GESTION DE FLUX DANS LES RÉSEAUX ET GESTION DE FLUX DANS L’INTERNET

J’ai entendu et lu beaucoup de choses sur le sujet et l’amalgame est dommageable.

NDLR: Ne voulant pas, moi aussi participer à cette embrouillamini, je ne décrirais pas l’alternative que TOUS les services soient délivrés par Internet … Cela sera pour un autre billet et je pense qu’il nous faut encore une étape pour y arriver … l’étape de comprendre enfin qu’il est dans l’intérêt de TOUS d’avoir un Internet « qui fonctionne ».

Certains pays mettent en place une séparation nette entre l’infrastructure (là ou les fibres qui entrent chez vous) et les services / contenus / usages qui «s’expriment» dessus. Ainsi, il serait théoriquement possible :

> d’avoir plusieurs FAI (Fournisseurs d’Accès à Internet) sur un même support,
> d’avoir plusieurs services de téléphonie,
> et surtout … d’avoir plusieurs services audio-visuels, sans devoir acheter la logique d’intégration verticale essayée par beaucoup et qui impose un empilement de «box» et de télécommandes à la maison.

Il devient, alors, plus facile de saisir les particularités des différents métiers :

> Le métier d’opérateur Internet, le vrai, devrait d’être électriquement neutre et dans certains cas précis (problèmes de sécurité qu’il faut convenablement définir) se mettre en situation de type «best effort» où l’on fait de son mieux pour qu’un paquet qui rentre sur son réseau en ressorte LE PLUS VITE POSSIBLE.

On ne règle pas par le réseau des choses qui doivent se gérer ailleurs … par les applications et l’intelligence qui est laissée aux utilisateurs de s’organiser.

Le métier d’un opérateur d’infrastructure est différent et il peut, lui, être amené à régler des problèmes de gestion de flux, de la meilleure façon possible. Depuis la nuit des temps, on fait de la gestion de classe de service … pour les entreprises … et même pour les particuliers OUI … AUJOURD’HUI … chez vous. Les différents flux qui sortent de la box de votre opérateur sont déjà «gérés». Vous avez l’Internet, la voix et la vidéo. C’est à l’opérateur de se débrouiller pour que l’un ne gène pas trop l’autre. Dire cela ne veut pas dire tripatouiller l’Internet.

Quand au métier de FAI (celui qui vend la connexité Internet à Madame Michu), c’est un bon moment pour essayer de définir ce qu’il devrait être. Peut être qu’il serait temps si ce n’est de parler de CHARTES, au moins de définir :

> un commun dénominateur inaltérable,
> d’imposer que l’on nous explique ce qui n’est pas vendu et que le FAI dise par avance les « entorses » qu’il se réserve le droit de faire. Ensuite … au marché de dire s’il accepte ou non. Certains voudront payer plus cher pour avoir un service qu’ils jugeront meilleur. Pourquoi ne pas les laisser faire ? Cela veut-il dire Internet a plusieurs vitesses ? Oui. Et alors … Je préfère un Internet à plusieurs vitesses à un Internet Canada Dry, qui aurait la couleur d’Internet, l’odeur d’Internet mais … qui n’en serait pas.

Alors pourquoi ce sujet, aujourd’hui ?

Parce que tout se mélange et s’emmêle : intérêts privés, volontés altruistes. Véritables problèmes et fausses solutions.

On est face à un plat de spaghetti de plus en plus inextricable. On mélange allègrement des problématiques d’infrastructure (globale / desserte (et non collecte) / d’infrastructures Internet, de Services Internet (DNS, SMTP …), d’applications classiques, de cathédrales verticales (Google, Facebook  …), de  contenus (Internet / pas Internet, légaux / pas légaux …) … sans s’apercevoir que l’on traite des choses différentes, avec des logiques et des modèles économiques différents. A trop vouloir voir si l’herbe est plus verte dans le champ d’à côté, on en oublie de s’occuper du sien et il est alors trop tard.

Et qui plus est, on confond l’Internet et le Web, ce qui n’est pas nouveau, mais qui continue d’être stupide, pour ne pas dire plus.

Mais on commence quand même par se rendre compte que le sous-jacent de tous nos échanges va s’appeler Internet, dans quelques années … nous l’avions rêvé, nous l’avons fait. Aussi, cela nous donne encore plus de devoir pour veiller à conserver un Internet en bon état de fonctionnement POUR TOUS … pas seulement au service de la distribution du contenu de quelques uns MAIS SURTOUT de la libre innovation et capacité de créer par chacun.

C’est cela pour moi l’enjeu de la neutralité de l’Internet … que personne ne puisse s’accaparer notre capacité d’échange, de communication et de création en un mot d’EXISTER sur ces futurs territoires numériques.

En regardant ce qu’il se passe de l’autre coté de l’Atlantique, on s’apperçoit que certains ont déjà parfaitement compris ce problème … alors, pourquoi pas nous ?

Ne serait-il pas temps d’avancer un peu plus vite pour nous aussi participer pleinement au potentiel du numérique et ne pas laisser un boulevard aux autres ?

Crédit photo : plumetrobon,

> Article initialement publié sur jmp.net

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