OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Eloge de la ville dense ou le déclin du paradigme urbain américain http://owni.fr/2011/02/26/eloge-de-la-ville-dense-ou-le-declin-du-paradigme-urbain-americain/ http://owni.fr/2011/02/26/eloge-de-la-ville-dense-ou-le-declin-du-paradigme-urbain-americain/#comments Sat, 26 Feb 2011 09:00:42 +0000 Philippe Gargov http://owni.fr/?p=48408

Je suis grand fan du Daily Show, émission de satire politique diffusée depuis 1996 sur Comedy Central (high five, Iris). Alors, quand Jon Stewart reçoit un économiste de Harvard pour dire du bien de la vie urbaine, vous vous doutez bien que je regarde attentivement. Edward Glaeser [en]était en effet invité, ce lundi 14 février, à présenter son livre au titre clair comme de l’eau de roche : Triumph of the City: How Our Greatest Invention Makes Us Richer, Smarter, Greener, Healthier, and Happier (Le triomphe de la ville : comment notre plus grande invention nous rend plus riche, plus intelligent, plus heureux et en meilleure santé. Rien que ça.).

L’émission aurait pu se contenter d’être drôle (malgré un Edward Glaeser sous amphét’). Mais si je vous en parle, c’est aussi et surtout parce qu’une telle interview est fortement révélatrice. Car pendant des décennies, le « rêve américain » n’a eu pour seul étendard que le modèle – désastreux – de la suburbia [en] pavillonnaire. Mais les temps changent, alléluia !

Ce n’est en effet une nouvelle pour personne : le paradigme urbain des États-Unis est en train d’évoluer, sous l’influence des crises récentes (subprimes + environnementale + prix du pétrole, etc). Les villes partent donc depuis quelques années à la reconquête des Américains (on note d’ailleurs plusieurs exemples notables dans la pop-culture, notamment les séries. Il faudrait que je pense à en faire un billet, pour prolonger ce que j’écrivais ici, en écho à cet article [en]).

Qu’un économiste vienne rappeler les vertus de la ville dense dans ce type d’émission est donc un signe fort (l’émission rencontre un certain écho auprès des jeunes adultes peu intéressés par les émissions politiques plus classiques). Cela se ressent parfaitement dans l’interview et les commentaires de Jon Stewart, en particulier à partir de 3’50.

Edward Glaeser le dit clairement : « C’est la raison pour laquelle j’ai écrit ce livre : j’espère vraiment que nous arriverons à dépasser l’idée que le seul “rêve américain” est le pavillonnaire périurbain. » (en gros) Il revient aussi sur le « fétichisme de la propriété », l’ineptie des investissements autoroutiers, les vertus des transports collectifs et de la marche, etc. Ce à quoi répond Jon Stewart, volontairement naïvement : « Les suburbs nous tirent donc vers le bas ? Les villes seraient donc la « vraie » Amérique ? » De là à exterminer les suburbs, comme le proposait Nogo Voyages pour le concours Reburbia [en] (image ci-dessous), il n’y a qu’un pas que Jon Stewart franchit avec insolence !

Après avoir fourbi ses armes dans l’ombre, la ville dense profite donc de la crise des suburbs pour passer à l’offensive, ce que traduit bien cette interview tragi-comique. Un discours qui ne passe pas forcément chez les défenseurs de ce fameux rêve américain des périphéries, comme en témoigne ce commentaire [en] grinçant (je me sentirai presque visé, hihi !) :

Ce livre s’adresse à tous ces bourgeois-bohèmes faussement sophistiqués qui veulent se sentir supérieurs à tous ces pecnos campagnards paumés au fin fond de la cambrousse. Ça me rend malade.

La guerre est déclarée.

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Je ne vous ai ici mis que l’interview d’Edward Glaeser. Mais je vous conseille vivement de regarder l’émission dans son ensemble, qui revient notamment sur le discours médiatique américain à propos de la révolte égyptienne. Mordant, et terriblement drôle.

Billet initialement publié sur [pop-up] urbain sous le titre “Les villes c’est chouette ça colle aux dents”

Image CC Flickr by jdnx

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Les jeux vidéo, nouveaux fossoyeurs du rêve américain? http://owni.fr/2010/07/16/les-jeux-video-nouveaux-fossoyeurs-du-reve-americain/ http://owni.fr/2010/07/16/les-jeux-video-nouveaux-fossoyeurs-du-reve-americain/#comments Fri, 16 Jul 2010 11:15:34 +0000 Philippe Gargov http://owni.fr/?p=22226 Dit autrement : et si les jeux vidéo, notamment américains, reprenaient enfin le flambeau des contre-utopies urbaines  (ou « dystopies », en français vaniteux) ?

Depuis toujours, les artistes sont au premier rang lorsqu’il s’agit de critiquer les modèles urbains dominants et/ou socialement symboliques (tels que Las Vegas). New York, Tokyo, Los Angeles ou Shanghai ont ainsi toutes été décrites sous le regard parfois sévère d’écrivains, de peintres, de mangaka ou de cinéastes. C’est maintenant au tour des jeux vidéo de rentrer dans la danse, preuve de leur accession progressive à ce statut de « noble art ».

Le rêve américain et ses diverses traductions urbaines en ayant (logiquement) souvent pris pour leur grade dans ce domaine, on retrouve sans surprise quelques têtes connues parmi les villes concernées par ces nouvelles dystopies vidéoludiques.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Las Vegas sert ainsi de décor aux dernières aventures de la série post-apocalyptique Fallout, sobrement intitulées Fallout : New Vegas. Paradoxalement, la cité du vice apparait ici être un oasis de civilisation perdu au milieu d’un désert post-apocalyptique. How ironic.

N’étant pas franchement familier de la série(1) , je ne pourrais vous en dire beaucoup plus, et vous renvoie donc à ce cher Google. Ou bien, si l’envie vous prend, vous pouvez faire partager votre amour pour ce jeu dans les commentaires, que je remonterai volontiers dans le corps de ce texte !

Le trailer et les quelques artworks présentés ci-dessus sont en tous cas suffisamment expressifs : il est fini, le temps des clichés urbains des années 80-90, où les jeux vidéo ne proposaient qu’une vision caricaturale des principaux modèles de ville (cf. l’excellent cahier Légendes urbaines, aux éditions Pix’N’Love). En participant à leur manière à renouveler la production de contre-utopies originales et de qualité, les jeux vidéo assument pleinement leur rôle d’art critique. Et c’est tant mieux.

L’accent vintage du trailer de Fallout : New Vegas évoque un autre jeu, sorti lui en 2007 (sa suite est sortie fin 2009), dont je souhaitais vous parler depuis longtemps : Bioshock, et sa majestueuse cité sous-marine Rapture (voir aussi ), véritable personnage à part entière du scénario.

Comme l’explique le discours de son fondateur fictif, la ville de Rapture s’envisage comme « zone-franche » à l’écart du gouvernement, de la religion, de l’éthique.

Mon nom est Andrew Ryan. Permettez-moi de vous poser une simple question : Ce qu’un homme obtient par le travail à la sueur de son front… Cela ne lui revient-il pas de droit ?

‘Non,’ répond l’homme de Washington. ‘Cela appartient aux pauvres.’ ‘Non,’ répond l’homme du Vatican. ‘Cela appartient à Dieu.’ ‘Non,’ dit à son tour l’homme de Moscou. ‘Cela appartient au peuple.’

Pour ma part, j’ai choisi d’ignorer ces réponses. J’ai choisi une voie différente. J’ai choisi l’impossible. J’ai choisi… Rapture.

Une cité où les artistes ne craindraient pas les foudres des censeurs. Où les scientifiques ne seraient pas inhibés par une éthique aussi artificielle que vaine. Où les Grands ne seraient plus humiliés par les Petits.

Et, à la sueur de votre front, cette cité peut aussi devenir la vôtre.

Un vrai paradis néo-libéral, dont le jeu permet de mesurer toute la folie – au sens propre comme au figuré.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La sortie récente de ces jeux n’est pas anodine. Ils confirment le souffle nouveau que peuvent injecter les jeux vidéo dans le paysage des utopies et contre-utopies. Il existe évidemment d’autres dystopies vidéoludiques remarquables. Si vous en avez en tête, n’hésitez pas à les partager en commentaire !

PS : Pour d’autres paysages urbains originaux dans les jeux vidéo, n’hésitez pas à jeter un œil à la page Ludotopies, que je m’efforce de densifier de temps en temps.

J’ai toujours eu du mal avec les backgrounds post-nucléaire ; la faute à mes origines balkaniques, peut-être ? ^^

Billet initialement publié sur pop-up urbain sous le titre “New Vegas Parano et autres dystopies vidéoludiques” ; image CC Flickr karenchu121

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