OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 L’Éthiopie, futur ennemi de l’Internet http://owni.fr/2012/06/21/lethiopie-futur-ennemi-de-linternet/ http://owni.fr/2012/06/21/lethiopie-futur-ennemi-de-linternet/#comments Thu, 21 Jun 2012 16:12:59 +0000 Anaïs Richardin http://owni.fr/?p=114164

Cybercafe d'Ethiopie (1)

Depuis quelques jours, une loi qui réglemente sévèrement les télécommunications en Éthiopie inquiète les médias internationaux.  Ils sont nombreux à avoir relayé, de manière souvent exagérée, cette nouvelle législation sur la pénalisation de l’usage des télécommunications dans ce pays de la corne de l’Afrique. De la BBC à TechCentral en passant par AlJazeera ou Le Monde , les titres font frémir : “15 ans de prison pour les utilisateurs de Skype“, “l’Éthiopie criminalise Skype“, “l’Éthiopie verrouille Skype et d’autres services internet qui utilisent Tor“. Que cachent-ils en réalité ?

Présentée par la plupart comme une loi votée le 24 mai, elle n’est en fait qu’un projet encore à l’étude. Sans compter que la disposition qui fait bondir les journalistes, soit la pénalisation de l’utilisation de services de téléphonie ou de fax par internet, est déjà en vigueur depuis… 10 ans.

La charrue avant les boeufs

Le 7 juin, Reporters sans frontières (RSF) publie sur son site un article qui tire la sonnette d’alarme sur le renforcement du contrôle d’internet par l’État éthiopien. Dénonçant diverses entraves à la liberté d’information et d’expression, RSF met le doigt sur une législation éthiopienne qui aurait été votée il y a peu, indiquant que :

L’usage de la VoIP [Voice over internet protocol, NDLR], ou de tout matériel à cet usage vient juste d’être déclaré illégal par la nouvelle législation des services Télécom éthiopiens, qui a été ratifiée le 24 mai. Quiconque contrevient à ce règlement est passible d’une peine de 15 ans de prison.

Reporters sans Frontières ne précise pas que cette loi, intitulée “A proclamation on telecom fraud offences”, n’a pas encore été votée, et qu’elle est encore entre les mains des membres de la Chambre des Représentants qui décideront de son sort. Mais il est impossible de se référer au Journal Officiel éthiopien qui ne paraît qu’en papier, et qu’une bonne âme met ensuite en ligne. Interrogé par Owni sur l’état du projet, le gouvernement a refusé de s’exprimer. Nous l’avons donc récupéré en ligne pour un examen moins superficiel.

La majorité des médias qui ont repris cette information du 7 juin ont fait un raccourci en affirmant que l’usage de Skype pouvait conduire à 15 ans en prison. Cette sanction, qui est la plus importante prévue, ne s’applique pas à l’usage de la VoIP.

Une interdiction vieille de dix ans

L’alinéa 3 de l’article 10 stipule ainsi que “toute personne offrant un service de téléphonie ou de fax par internet commet une infraction passible d’une peine de prison de 3 à 8 ans et d’une amende dont le montant correspond à cinq fois les bénéfices que cette personne a pu tirer de la fourniture de son service durant sa période d’activité”.

Cette disposition s’adresse donc avant tout aux professionnels, et notamment aux propriétaires de cybercafés, principaux lieux de connexion en Éthiopie. Les usagers encourent une sanction plus légère décrite à l’alinéa suivant :

Toute personne qui bénéficie du service stipulé à l’alinéa précédent, de manière intentionnelle ou par négligence, commet une infraction passible de 3 mois à 2 ans d’emprisonnement et d’une amende comprise entre 2 500 Birr [111 euros, NDLR] et 20 000 Birr [891 euros, NDLR].

Passer un appel via Internet peut donc coûter cher, si tant est que la législation soit appliquée. Car la pénalisation de l’usage de la VoIP ne date pas d’hier. Depuis 2002, une loi régissant les télécommunications prévoit que « l’usage ou la fourniture de services de communications vocales ou fax par internet est interdit ».

Protectionnisme

Pourtant à Addis Abeba, la capitale, les cybercafés proposent tous ce service depuis de nombreuses années. Interviewé sur ce projet de loi, Misrak Belay, propriétaire d’un de ces lieux,  affirme ne pas l’interdire à ses clients :

Les gens utilisent ces technologies dans mon cybercafé. Je ne suis pas au courant de la nouvelle législation.

Les propriétaires et usagers de cybercafés sont donc dans l’illégalité sans le savoir. Le seul cas connu d’arrestation pour utilisation de VoIP est celui de Yidnek Hail, un Éthiopien de 31 ans qui aurait été arrêté en 2011 dans un cybercafé d’Addis Abeba pour avoir fait une démonstration de Skype à certains clients. Pour le gouvernement, qui détient Ethio-Telecom (géré par France Télécom), unique fournisseur de télécommunications en Éthiopie, les services de VoIP sont une concurrence dangereuse à éradiquer.

Cybercafé d'Ethiopie (2)

Pour Elizabeth Blunt, ancienne correspondante à Addis Abeba pour la BBC, l’État cherche à limiter les pertes :

Les cybercafés peuvent permettre aux gens de passer des coups de téléphone pour une somme dérisoire comparée au coût d’Ethiopia Telecom, le fournisseur public de télécommunications qui a le monopole et qui pratique des tarifs exorbitants.

Mais il n’existe aucune donnée publique qui permettent de se faire une idée de ces supposées pertes. Elizabeth Blunt voit cependant une autre raison à cette loi, beaucoup moins défendable cette fois :

On ne peut pas écouter et contrôler les communication Skype aussi facilement [que les conversations téléphoniques, NDLR].

Surveillance des citoyens

Ce que reconnait l’Information Network Security Agency (INSA), chargé d’assurer la sécurité du réseau,  qui a écrit le texte, dans le préambule :

La fraude dans les télécommunications est une sérieuse menace à la sécurité nationale, au-delà des pertes économiques qu’elle engendre.

Avec cette nouvelle loi, l’État éthiopien se donne encore plus de pouvoirs pour surveiller et museler les dissidents. Un article déclare que “toute personne qui détient ou utilise du matériel de communication sans avoir obtenu au préalable une autorisation du Ministère de l’information et des télécommunications commet une infraction passible d’une peine de prison comprise entre un et quatre ans et d’une amende entre 10 000 Birr [448 euros, NDLR] et 40 000 Birr [1795 euros, NDLR].”

Cybercafe d'Ethiopie (3)

Cette disposition ouvre un boulevard aux autorités qui voudraient poursuivre des citoyens qui sortiraient du rang. Dans ce texte, le “matériel de télécommunication” désigne “tout système utilisé ou pouvant être utilisé pour des services de télécommunication, accessoires et logiciels inclus”. Ainsi, détenir une page Facebook, un site web ou un blog pourrait être punissable de quatre ans de prison. Une restriction de la liberté d’expression à laquelle l’Éthiopie est plutôt habituée.

L’Éthiopie, qui n’apparait pourtant pas  dans le classement des ennemis de l’Internet de RSF, a emprisonné de nombreux journalistes dissidents, considérés comme “terroristes” pour avoir critiqué le gouvernement.

Avec cette nouvelle loi, les journalistes n’auront plus l’apanage du titre de “terroristes” puisqu’un article pénalise tout “usage d’un réseau ou appareil de télécommunication pour diffuser un message obscène ou visant à semer la terreur “.

Ces messages “obscènes ou “visant à semer la terreur ” pourront notamment être jugés au regard de la loi “anti-terroriste” promulguée en 2009 et ardemment décriée depuis. Cette loi indique que toute personne qui encourage ou apporte un soutien moral à des groupes ou des causes terroristes (dont le parti politique d’opposition Ginbot 7 fait partie) encourt une peine de 20 ans de prison. Le blogueur Endalk donne un exemple concret du résultat choc de la combinaison de ces deux lois :

Poster un simple statut pour soutenir un journaliste en exil ou un dissident politique peut vous envoyer derrière les barreaux pour cinq à huit ans.

Une hérésie au regard de la Constitution éthiopienne qui précise que “l’inviolabilité des lettres, messages et communications échangés par téléphone ou par tout moyen de télécommunication ou appareil électronique est garantie à toute personne”. RSF craint ainsi que cette loi et l’usage récent de DPI menacent encore davantage la liberté d’information et la liberté d’expression.

Cette situation a été très peu relayée par les médias nationaux. Par peur de tomber sous le joug de la censure de l’État ou tout simplement parce que cette loi ne touche qu’un faible nombre d’Éthiopiens ?  Seul 0,75% de la population utilise aujourd’hui Internet, faisant ainsi de l’Éthiopie le second pays d’Afrique avec le plus faible taux de pénétration d’Internet, juste derrière la Sierra Leone.


Cybercafes d’Ethiopie par Travel Aficionado [CC-bysa] et Charles Fred [CC-byncsa] via leurs galeries Flickr

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Qui peut le Google +, peut le moins http://owni.fr/2011/07/01/qui-peut-le-google-peut-le-moins/ http://owni.fr/2011/07/01/qui-peut-le-google-peut-le-moins/#comments Fri, 01 Jul 2011 16:25:47 +0000 Pierre Ropert http://owni.fr/?p=72393 Google… Mail, Documents, Reader, Agenda, Traduction, Actu, Maps, Earth, Talk, Images, Calendar, Analytics, Shopping, Livres, Groupes, Takeout… Il en fallait bien un de +. Ce sera donc Google +. Le dernier né du géant du web, un réseau social rien de moins, a débarqué hier sur la toile. Après quelques échecs retentissants en matière d’innovation, Google semble avoir appris de ses erreurs en proposant un service sans l’imposer (on se rappellera Google Buzz) et qui a le mérite d’être extrêmement simple d’utilisation (contrairement à Google Wave).

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Cette fois-ci, il ne s’agit pas de se précipiter, mais bien de proposer aux intéressés de tenter la bêta Google +. A ce stade, le plus dur reste encore d’y être invité. Car malgré ce statut de service en cours de développement, théoriquement buggé et incomplet donc, les demandes d’accès ont été si nombreuses que Google s’est vu dans l’obligation de ralentir la cadence, comme l’explique Vic Gundotra, vice-président de la division Engineering pour Google :

Nous avons du clôturer les demandes d’invitations pour la nuit. La demande est dingue. Nous avons besoin de nous occuper de ça soigneusement et de façon contrôlée. Merci à tous pour votre intérêt.

Hier, sur Twitter, Google + était la principale attraction et les demandes de comptes spammaient littéralement les timelines. Même avec un service théoriquement fermé – les invitations fonctionnaient de manière assez aléatoire jeudi matin, il était possible d’inviter de nouveaux utilisateurs grâce à un petit procédé simple au possible : tout détenteur d’un compte pouvait poster un article sur l’équivalent de son mur Facebook, puis choisir de le partager non pas avec des utilisateurs déjà inscrits, mais avec des adresses gmail. Résultat : une course aux invitations effrénée pour pouvoir tester le petit dernier de Google. Les plus impatients pouvaient visionner la démo [en].

Dans Ton Cercle

Après avoir reçu le mail d’inscription ô combien convoité, il est proposé à l’utilisateur une page “Premiers pas” pour découvrir les principales options de Google +. Au passage, et si l’early adopter le souhaite, il peut synchroniser son nouveau profil avec ses comptes Youtube et Picasa utilisant la même adresse gmail. On retrouve tous les éléments propres aux réseaux sociaux sur la page du profil : timeline verticale, informations sur l’utilisateur, choix des informations à afficher, tchat incorporé – Gtalk en l’occurrence, etc…

Rien de nouveau donc, excepté une meilleure compréhension de l’utilisation actuelle des réseaux sociaux, et un service développé en conséquence grâce aux Cercles. Voilà la véritable innovation de Google +.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le grand défaut de Facebook est l’impossibilité (ou a minima la complexité) de la gestion des différents cercles sociaux : connaissances, proches, famille, collègues… Autant de personnes avec qui on ne désire pas partager les mêmes informations. Google + propose au contraire de faire une distinction nette en organisant ces différents groupes par cercles. Dès lors, lorsque l’on publie une information ou un article, il est proposé de ne le partager qu’avec les cercles souhaités. Les informations “potes de beuverie” resteront cantonnées à ce cercle d’amis, et ces derniers n’auront quant à eux pas à subir votre passion pour la philatélie (qui sait ?).

Le parfait contre-pied de Facebook donc, qui, par défaut, publie les données à tout le monde. Finie la pénible sélection au clic par clic des personnes dont ne veut pas qu’elles aient accès aux informations ou photos compromettantes.

L’interface ressemble en revanche à s’y méprendre à celui de Facebook, le bleu en moins. Une apparence qui permet à l’utilisateur récemment inscrit de ne pas se sentir complètement perdu. La gestion de l’information est quant à elle bien plus proche de celle de Twitter. On ne choisit pas ses abonnés (on peut les masquer ou les bloquer mais il ne s’agit pas d’un système fonctionnant sur invitation), mais on peut choisir de visualiser le flux d’informations d’une liste… ou plutôt d’un cercle.

Google + = Twitter + Facebook + Skype ?

Ce principe de cercles permet surtout à Google + d’être utilisé de deux façons bien distinctes.

Le réseau social de Google peut ainsi être utilisé de la même manière que Twitter, la limite des 140 caractères en moins. Preuve en est de la partie « Déclics » (ou Spark), qui permet de se tenir informer sur des sujets particuliers, avec une pré-sélection d’informations. On choisit un sujet (Série TV, Cinéma, Sorties VTT, Pedobear…), et les articles d’actualité sur cette cible remontent automatiquement dans le flux d’informations.

En l’état, rien ne semble configurable, mais cette partie de Google + pourrait bien être amenée à évoluer vers les Fanpages de Facebook. En mixant des Cercles de personnes soigneusement sélectionnées et les Déclics (une combinaison pour le moment impossible), Google + pourrait empiéter sur le terrain de Twitter en permettant une veille performante. Pour autant la veille sur le site de microblogging est efficace justement parce que l’information y est condensée, sans la limite de signes, le flux sur Google + pourrait rapidement devenir surchargé.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

L’autre façon d’utiliser est plus propre à Facebook. Google + s’attaque ainsi à la chasse gardée de Marc Zuckerberg : l’organisation et la communication via réseau social. Après les apéros géants Facebook, les apéros géants Google ? Le fait est qu’en la matière, les outils proposés par Google surclassent largement ceux de Facebook.

Non seulement les cercles permettent de mieux gérer des communautés, mais le tchat, en plus d’être accessible à plusieurs personnes (on peut ainsi discuter avec l’intégralité d’un cercle ou une sélection d’amis d’un simple Clique, ou Huddle en anglais),  peut déboucher sur des visioconférences incluant jusqu’à 10 personnes. Ce sont les “bulles“, un concept à mi-chemin entre Skype et Tinychat. Particulièrement apprécié de la génération accro aux réseaux sociaux, il pourrait bien être une des clés du succès de Google +.

Cet aspect de Google + est également intéressant sur un plan professionnel. Pour ne prendre que l’exemple d’Owni, qui communique énormément en interne grâce à Gtalk et par Gmail, il suffirait de créer un cercle “Owni/22mars” dans lequel poster tous les liens utiles. De la même manière, il est tout aussi facile de délocaliser une petite conférence de rédaction grâce à la visioconférence.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Et le nouveau réseau social a encore ses petits + : les like remplacés par des “+1″ qui sauront plaire aux habitués des forums de discussion, un système de notifications largement amélioré, des albums photos esthétiques et qui regroupent l’actualité des différents cercles, et probablement d’autres surprises sous le coude que nous n’avons pas encore eu l’occasion de découvrir.

Reste à savoir si les utilisateurs s’empareront de l’outil en y voyant un Facebook +. A en juger par les premières réactions, Google + pourrait bien être le fameux Facebook killer. Mais sans une arrivée massive d’utilisateurs, il est probable qu’un destin similaire à celui de Google Wave ne l’attende : un abandon progressif succédant à un engouement rapide.

Pour éviter cet écueil, Google+ serait donc avisé de mettre en place une option de migration des profils Facebook vers sa plateforme… et surtout de permettre l’accès à des applications. Car sans Farmville et autres consœurs présentes sur le réseau social, beaucoup d’utilisateurs de Facebook seront peu enclins à migrer sur Google +.

Google +, vie privée - ?

Jusqu’ici les fils d’information sont délicieusement vierges de “Découvres qui a répondu à telle question sur toi“, “Qui consulte le plus votre profil ?“et autres applications parasites. De la même manière, les Fanpages ou la publicité sont absentes. Seules les informations partagées par les contacts sont visibles. Si le constat est agréable pour l’utilisateur, il est peu probable que la firme y trouve son compte. Il s’agit encore d’une bêta et Google + devrait évoluer vers un modèle plus rentable. Tout comme l’Android Market concurrence de plus en plus l’AppleStore, Google + risque fort de se développer de manière à concurrencer Facebook : applications, pages officielles, et publicités devraient alors être de mise. Ainsi on peut d’ores et déjà se douter de l’arrivée d’une plateforme “Google Games”, comme l’a découvert le site Stillbruch.at[en] en s’intéressant au code source de Google + :

So. So code-druggie me… of course… started poking around in the code and found the following stuff:

f={ia:b.item.ia,sa:b.sa,ga:b.ga,Cf:b.Ab.GADGET_NAME},g=e||new M,f=Vx(f,m,c)+(” sent you a gift from “+(R(f.Cf)+”.”));

and:

f={ia:b.item.ia,sa:b.sa,ga:b.ga,Cf:b.Ab.GADGET_NAME},g=e||new M,f=Vx(f,m,c)+(” invites you to play “+(R(f.Cf)+”.”));

have sent you Game invites and more from Google+ Games}=4{“

La rumeur veut que le premier de ces jeux[en] soit justement Farmville, voire un nouveau jeu de l’éditeur Zynga. Question rumeur, Google vient justement de prouver qu’elles avaient tout lieu d’être justifiées.

Outre Google Games, les informations concédées à Google par les utilisateurs du service devraient devenir rentables… exactement de la même manière qu’avec Facebook.

La question est donc de savoir si Google + réussira à s’imposer sur un marché détenu, pour l’essentiel, par deux concurrents. Le moteur de recherche a depuis longtemps cessé d’en être un. Il a vu sa présence croître sur la toile de manière quasi exponentielle. Jusqu’ici, Google s’est surtout imposé grâce à des outils innovants. En lançant Gmail, Google avait fait le pari de s’imposer sur un secteur qui n’avait pas particulièrement besoin d’un nouvel arrivant. L’avènement de l’adresse en « gmail.com » est dû pour l’essentiel aux services proposés par le géant du web, parmi lesquels Googledocs, GoogleAgenda, et autres outils rapidement devenus indispensables. Depuis, les deux dernières tentatives de Google en la matière (Wave et buzz) se sont soldées par un échec.

Dans l’immédiat Google + n’est pas exempts de bugs (la page « Déclics » est par exemple restée affichée au dessus de certains flux d’information sans que les utilisateurs puissent l’en enlever, certaines actions publiées sur le mur ont tendance à s’afficher à plusieurs reprises, etc). Mais son nouveau service a l’avantage d’avoir déjà pléthore d’outils à sa disposition. La synergie entre ces derniers assure à Google + un public conquis d’avance.

Reste une inquiétude : l’omniprésence de Google sur le web. Le « Don’t be Google » va-t-il succéder au « Don’t be evil » ?

Illustration Flickr PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales par Aray Chen

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Instantané de neutralité http://owni.fr/2011/06/27/instantane-de-neutralite/ http://owni.fr/2011/06/27/instantane-de-neutralite/#comments Mon, 27 Jun 2011 14:20:51 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=71470 C’est une première en Europe : les Pays-Bas viennent de protéger le principe de neutralité des réseaux dans la loi. Concrètement, cela se traduit surtout sur l’Internet mobile, espace où les atteintes à la neutralité ne sont ni discrètes, ni exceptionnelles. Les opérateurs téléphoniques se voient désormais interdits de tout blocage ou de toute surfacturation de service Internet comme la Voix sur IP (VoIP) dans le royaume.

Souvent cité en sa qualité d’acteur majeur de la VoIP, Skype s’est réjoui il y a quelques semaines de cette initiative qui était alors encore à l’état de projet, en appelant les utilisateurs européens à faire évoluer la situation chez eux :

Si vous rencontrez encore des difficultés à utiliser Skype sur n’importe quel service connecté à Internet, contactez votre FAI, contactez l’association de consommateurs locale, contactez le député européen de votre circonscription. Faites entendre votre voix afin que votre liberté sur Internet soit respectée.

La compagnie fait les frais des manœuvres des télécoms sur mobile dans la majorité des pays européens (voir notre “Carte des Internets européens”). En France, les trois opérateurs interdisent la voix sur IP, le Peer to Peer et les newsgroups. A moins bien sûr que le client concède à payer davantage, et encore, uniquement dans le cas de la VoIP – le reste étant exclu. Une option qui atteint les 15 euros par mois chez Orange. Une façon efficace de tuer la concurrence selon Skype et les autres. Avec, pour dommage collatéral, le réseau, et sa neutralité.

Mais l’offensive néerlandaise pourrait faire des vagues en Europe. “Les restrictions imposées par les Pays-Bas pourraient influencer le large débat entamé en Europe sur la neutralité des réseaux, poussant d’autres pays sur le continent à empêcher les opérateurs d’agir en tant que collecteur autoproclamé d’une taxe sur l’Internet mobile”, écrit ainsi The New York Times.

Le conditionnel reste néanmoins de mise, vu la prudence -si ce n’est la frilosité- de la Commission européenne à l’égard d’une protection offensive de la neutralité, en particulier dans le mobile. Pour ce qui est de la France, si celle-ci a longtemps été considérée comme précurseur en la matière (et ce notamment par ses voisins européens), elle risque fort de se faire distancer si ses premières réflexions n’aboutissent pas. Encore une fois, l’affaire reste à suivre et l’engagement des Pays-Bas fait figure de bonne piqûre de rappel.

L’occasion de rappeler, en une infographie issue du blog Internet & Moi du monde.fr (et légèrement enrichie), le principe même de neutralité: les tuyaux doivent rester bêtes. A la manière d’un facteur, les opérateurs n’ont pas à mettre le nez dans le flux transitant par leurs infrastructures. Interception, surveillance, modification ou ralentissement du flux dénaturent les fondements même d’Internet et sont, par là-même, inacceptables. Horizontal, acentré: c’est à ce titre que le réseau permet innovation et fourmillement d’informations.


Illustration et infographie CC S. Desbenoit

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Neutralité en Europe: laissez-faire et petits pas http://owni.fr/2011/04/14/neutralite-internet-europe-commission-laissez-faire-et-petits-pas/ http://owni.fr/2011/04/14/neutralite-internet-europe-commission-laissez-faire-et-petits-pas/#comments Thu, 14 Apr 2011 16:09:41 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=56935 L’Europe se contre-fiche-t-elle de la neutralité des réseaux? C’est la conclusion à laquelle on serait bien tenté d’arriver, tant le livre blanc consacré au sujet, annoncé le 30 juin 2010 par Neelie Kroes, vice-présidente de la Commission européenne chargée de la stratégie numérique, a été repoussé: initialement attendu fin de l’année dernière, puis fin mars 2011, il serait repoussé fin avril voire fin mai, selon les versions.

Plus que le retard cumulé, les épreuves qu’OWNI a réussi à se procurer traduisent un profond désintérêt pour la question, dont seule la France semble s’être véritablement emparée. Le contraste est d’ailleurs saisissant entre, d’un côté, le rapport  des deux députés Laure de la Raudière et Corinne Erhel, publié hier, qui se démarque non seulement par sa volonté de protéger un Internet “neutre et universel”, mais aussi par ses efforts de pédagogie et de rigueur, et les conclusions provisoires de la Commission européenne, qui déclarent qu’il n’y a pas matière à réguler le réseau, dans la mesure où selon elle, il y a trop peu de preuves d’enfreintes à la neutralité en Europe. Pourtant, ces entraves à la neutralité existent bel et bien: pour les partisans de la neutralité, le déni de la Commission n’en devient alors que plus inacceptable.

Extraits des conclusions provisoires de la "Net Neutrality Communication" de la Commission européenne. L'intégralité du document exclusif à retrouver au bas de l'article.

“Il serait prématuré à ce stade d’émettre des orientations supplémentaires sur la neutralité de l’Internet”

Premier constat, qu’il est toujours bon de faire: “l’Internet ouvert”, formule toujours pratique quand on souhaite parler de neutralité sans trop y toucher, constelle les conclusions provisoires de la Commission européenne sur le sujet.

Alors que la rapport d’informations français tranche par son engagement sans détour en faveur d’une neutralité des réseaux inscrite et protégée par la loi, le livre blanc européen irait à l’inverse dans le sens d’un “wait and see”: selon la Commission, trop peu d’atteintes à la neutralité ont été relevées en Europe pour lancer une règlementation en la matière, et l’adoption du troisième Paquet Telecom, imminente, devrait suffire à régler les menus écarts constatés.

Estimation des besoins pour des orientations additionnelles

Le cadre révisé sur les communications électroniques de l’Union Européenne contient des provisions qui traitent précisément des problématiques relatives à la neutralité de l’Internet, comme souligné plus haut dans la section 3. Alors que les États Membres transposent le cadre réglementaire révisé dans leur législation nationale, il est important de laisser du temps pour mettre en application ces dispositions et apprécier la façon dont elles s’opèrent en pratique.

Sur cette base, la Commission conclue qu’il serait prématuré à ce stade d’émettre des orientations supplémentaires sur la neutralité de l’Internet. La Commission, avec le BEREC [NDLR: Body of European Regulators for Electronic Communications], est actuellement en train d’étudier un certain nombres de problématiques qui ont fait surface au cours du processus de consultation, en particulier, les barrières au changement [d'opérateur] et les pratiques de blocage et de limitations. Sur la base de preuves qui pourraient être révélées, la Commission pourrait à tout moment dans l’avenir émettre des orientations supplémentaires.

C’est l’Internet mobile qui est au cœur des premières conclusions de la Commission, et plus particulièrement le choix des utilisateurs. L’institution reconnaît implicitement la difficulté de changer d’opérateurs, expliquant que ce basculement doit être facilité, non seulement sur la base de motivations financières et d’exigences de qualité de services, mais aussi dans le cas où un opérateur “impose des restrictions sur des services et applications particuliers”. Mais encore une fois, ces entraves ne sont pas suffisantes pour justifier une action de la Commission, qui croit par ailleurs en la force auto-régulatrice du marché.

Selon elle, le fait, pour un consommateur, de pouvoir facilement changer de prestataires de services mobiles “pourrait aussi agir comme un stimulus pour les opérateurs, qui devraient alors adapter leur tarifs et limiter les restrictions sur les les applications populaires, comme c’est le cas avec les service de VoIP sur les réseaux fixes. Ces facteurs combinés ensemble renforcent un environnement concurrentiel dans lequel l’innovation peut prospérer” En clair, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes européens.

Plus de 25% des opérateurs mobiles européens n’offrent pas un accès à Internet

Un constat que ne partagent évidemment pas les partisans de la neutralité des réseaux ou les prestataires de ces services dont l’accès est précisément entravé sur un Internet qui n’en est pas vraiment un.

Souvent citée en exemple, la firme de voix sur IP Skype se bat depuis des années avec les opérateurs pour pouvoir accéder à l’Internet mobile. L’un de ses représentants, Jean-Jacques Sahel, se dit plutôt déçu:

La situation n’est pas belle pour les sociétés de voix sur IP. Selon une étude de Voice over the Net, qui rassemble ces firmes, près d’un quart des opérateurs en Europe interdisent la VoIP. Alors entendre que la Commission européenne dit qu’il n’y pas assez de preuves… Quand jugera-t-elle bon d ‘agir ? Jusqu’où faudra-t-il aller ? Faut-il juste attendre que les restrictions sur Internet soit si étendues qu’il soit finalement trop tard pour revenir dessus ?

L’étude en question analyse les limitations sur l’Internet mobile dans les pays membre de l’Union Européenne. ” On compte seize pays dont on est sûr qu’il y a des restrictions sur la VoIP ou sur Internet en général; douze pour lesquels les informations sont très détaillées”, explique Jean-Jacques Sahel. “Il y a une centaine d’opérateurs mobiles dans l’UE et 28 opèrent des restrictions sur la VoIP”. Plus de 25% qui ne suffisent pas à faire bouger la Commission, ancrée dans une posture de confiance et de laissez-faire à l’égard du marché.

Pourtant, explique encore Jean-Jacques Sahel, il ne suffit pas de donner la capacité aux utilisateurs de changer d’opérateurs pour qu’ils l’actualisent: de nombreuses barrières existent. Sans compter que seul l’accès à certains gros sites pèse dans la balance: “si les opérateurs bloquent Google ou Facebook, alors oui, les utilisateurs vont certainement partir”, explique Jean-jacques Sahel. “Par contre, Skype, pas vraiment. Et tout le reste… Qui va changer [d'opérateurs] pour tous les autres sites ?”

L’attitude de la Commission européenne exaspère donc, et pas seulement les sociétés lésées. Les partisans de la neutralité de tout bord regrettent la faiblesse de ces réflexions. Côté français, on ne peut que constater l’avance de la réflexion sur la neutralité dans les plus hautes instances de l’État, en espérant que ce mouvement entraîne celui de Bruxelles. Ce n’est vraiment pas gagné, car en marge de la confiance (naïve ?) de la Commission dans le marché, les autres États membres semblent peu au fait de la question. Sur les 27, seuls douze ont répondu à l’appel à consultation publique lancé le 30 juin 2010, à l’occasion de l’annonce du livre blanc.

A l’heure qu’il est, une “Net Neutrality Communication” circulerait entre les différentes directions générales de la Commission, mais cela ne semble pas modifier en profondeur la teneur de sa position. D’aucuns soulignent aussi que le lobbying rodé de certains gros opérateurs aurait été particulièrement efficace.

Dans leur rapport rendu hier, les députés français Laure de la Raudière et Corinne Erhel évoquaient la possibilité d’une publication du livre blanc fin mai. Il y a quelques jours, le cabine de Jonathan Todd, porte-parole du DG Stratégie numérique rattaché à Neelie Kroes, refusait de communiquer avant le 19 avril, “date à laquelle la Communication sur la neutralité de l’Internet devrait être adoptée”.


Retrouvez tous les articles sur la neutralité, ainsi que notre dossier du jour (image de Une: Elsa Secco):

- Pour un Internet “neutre et universel”
- Internet et la technique: l’univers des possibles


Illustration CC FlickR par David Locke, image de clé par Loguy

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